C’est dans un container de la protection civile installé devant la gare que le président de CPAS de Trooz, Etienne Vendy, reçoit désormais. En effet, le bâtiment du CPAS le long de la Vesdre a été touché par les inondations de juillet dernier. Rapidement, l’équipe du CPAS – passée de 7 à 20 personnes en quelques mois – a déménagé dans la gare et bénéficie temporairement de containers de la protection civile. À peine le temps de se saluer, la journée commence déjà sur les chapeaux de roues… Un coup de fil : pas de chance, ces deux containers vont disparaître bientôt. En plus du reste, il faut maintenant en retrouver de nouveaux  !

Six mois après les inondations, les conséquences dramatiques de cet épisode climatique rythment encore le quotidien d’Etienne, tout comme celui de nombreux Trooziens et Trooziennes.

Entre les rencontres avec une agence immobilière sociale, l’écoute de personnes sinistrées, la gestion des problèmes quotidiens dans les logements sociaux ou encore la recherche de nouveaux containers, Etienne Vendy revient sur les événements…

«  Le jour-même des inondations, la première question que je me suis posée, c’était « Par où commencer ? » ». Les premiers coups de fil qu’Étienne a passés ont été fondamentaux dans la gestion de cette crise. « C’est là qu’on se rend compte de l’importance de son réseau, c’est ce qui m’a permis de débloquer les premières aides sur le terrain. Dans un premier temps, lorsque nous étions au centre de crise à Beaufays, mes priorités étaient : un toit et de la nourriture pour tout le monde ! » poursuit l’écologiste. Il a donc fallu reloger les personnes sans solution à court terme. Pour ce faire, le CPAS de Trooz a loué des gîtes, des lits dans des institutions psychiatriques, etc. Une aide médico-sociale a également été développée à travers trois unités de médecins sur le terrain.

Une fois sortis de l’épisode de crise, c’est tout un modèle durable qu’il fallait construire pour faire face aux dégâts dans la commune.

« Au CPAS, c’était une évidence que nous prendrions en charge tous les sinistrés qui en auraient besoin. Peu importe s’ils étaient déjà bénéficiaires du CPAS ou pas. » Avant les inondations, le CPAS de Trooz s’occupait de 300 personnes sur les 8000 habitant-e-s de la commune. Aujourd’hui, c’est à 1800 ménages que le CPAS vient en aide, soit à peu près 4000 personnes. La moitié de la population troozienne donc.

En charge du CPAS, du logement et de la santé publique, le modèle d’aide mis en place par Etienne Vendy est construit autour de trois axes primordiaux.

Le premier axe concerne donc le relogement de 200 familles sans solution. « Au fur et à mesure du temps, notre modèle s’est affiné et notre mission s’est étendue. Notre CPAS est presque devenu une agence de logements ! Nous discutons avec de nombreux acteurs pour trouver des solutions. » Lorsqu’il se promène dans la commune, Etienne est prêt à dégaîner son téléphone à tout moment au cas où il tomberait sur une pancarte À LOUER. Au-delà du relogement de ces 200 familles, il y a la réhabilitation des logements des personnes sinistrées. Et cela représente jusqu’à 4000 personnes. « C’est énorme » affirme Etienne Vendy.

Le deuxième axe autour duquel ce dernier structure le travail du CPAS c’est la gestion post-traumatique des sinistrés. « Lorsque je suis descendu dans la vallée, que j’ai vu les dégâts, j’ai directement mesuré l’ampleur des conséquences psychologiques que ça allait engendrer ». Par sa formation de psychologue, Etienne a anticipé la détresse psychologique des victimes et en a fait une priorité dans son travail et celui de son personnel. C’est par le biais de la proximité avec les citoyens et citoyennes qu’on peut apporter le meilleur soutien à ces personnes. Beaucoup de mesures ont été mises en place, avec l’aide des psychologues de terrain au sein du CPAS. « Les psychologues partent en maraude, vont parfois sonner à une porte quand ils entendent qu’une personne, paraît-il, ne va pas bien. Mais sans doute existe-t-il encore l’une ou l’autre situation dramatique dont nous n’avons pas connaissance. Bien que les services soient gratuits et bien que l’aide accessible via le CPAS soit ouverte à tout le monde, certaines personnes hésitent à se manifester. Parfois tout simplement parce qu’elles sont encore submergées par leurs travaux ou d’autres ennuis. »1. Dans une optique plus durable, ce sont des partenariats avec des centres psychologiques qui sont nécessaires.

Enfin, le troisième axe prioritaire dans le travail post-inondations d’Etienne est celui de l’aide sociale urgente : comment aider ceux et celles qui ont besoin d’une aide immédiate ?

Actuellement, le CPAS a mis sur pied une prime communale de 250€ pour tous les sinistrés directs et indirects. Un ménage dont l’habitation n’a pas été directement touchée par les inondations mais dont l’électricité et/ou le gaz a été coupé est considéré comme sinistré indirect. En décembre dernier, sur 1600 ménages sinistrés, 600 ont déjà contacté le CPAS pour solliciter cette aide. Dès qu’une demande nous parvient pour cette prime, nos assistantes sociales instruisent le dossier afin de mesurer les besoins de ces personnes et la façon dont nous pouvons les aider. « C’est notamment par ce biais qu’on peut repérer une détresse psychologique et qu’on peut envoyer nos psychologues sur le terrain » indique Etienne.

Grâce à ce système, la commune de Trooz innove en termes de cartographie : « Depuis la mise en place de ce modèle d’aide post-inondations, nous alimentons une base de données sous forme de cartographie qui reprend toutes les aides déjà fournies à chaque personne avec qui nous entrons en contact : prime, appel, aide sur place, aide administrative, soutien psychologique, etc. C’est super important pour la gestion de crise et c’est un outil très très précieux. »

Trois ans après son entrée en fonction et trois ans avant la fin de sa législature, Etienne Vendy accueille la situation positivement sans sous-estimer le travail qu’il reste à faire. « Comment je vois les trois prochaines années ? Comme aujourd’hui ! Le travail restant est titanesque ». Comme dans toute catastrophe, il y a du positif à retirer de cette situation. « Comme mandataire local, on n’aurait jamais imaginé faire face à la gestion de tels enjeux. Après le covid qui nous a poussé dans nos retranchements, c’est aujourd’hui des enjeux transversaux qu’on doit gérer : de la santé publique à l’urbanisme ! Malgré l’aspect dramatique des choses, il y a un côté très intéressant dans notre travail et une opportunité à saisir ». Après avoir passé quelques heures aux côtés de ce président de CPAS remarquable, on peut dire que ces défis font certainement partie des éléments qui le font tenir debout !

© VRT NWS

 

1Le Soir, 12 novembre 2021 « Le long de la Vesdre, la détresse psychologique ne fait encore qu’affleurer »